L'île des Marmitons
Voici ce que ma bonne Rose m'a conté Dimanche. Il y avait bien loin, bien loin, une île appelée l'île des Marmiton, et une femme gourmande, nommée Marmite, était la reine de cette île. On flattait dans tout la reine Marmite. Ici on donne aux jeunes filles des noms de fleurs, tels que Rose, Marguerite, Hyacinthe ; là-bas, pour flatter la reine, on leur donnait les noms des fruits ou des légumes ; on les appelait Aveline, Noisette, Amanda. Il n'était pas rare de rencontrer de belles jeunes filles qui s'appelaient Pomme-d'Amour.
Dans île des Marmitons, les femmes du commun se nommaient Carotte au lieu de Gavotte ; les garçons de ferme, Poireau au lieu de Pierrot. On était accoutumé à cet usage et il ne paraissant point ridicule. Le vicomte des Fourneaux était ministre-cuisinier d'état au département de l'intérieur. L'amiral Turbot était ministre cuisinier d'état au département de la marée. Le baron Lèchefrite, réfugié allemand, était au ministère des affaires étrangères ; et il avait pour secrétaire l'écuyer Pouding, jeune anglais de grande espérance, fils du baronnet Bifteck.
Mme Emile de Girardin
Mme de Girardin
Histoire complète de "L'île des Marmitons" sur gallica : Oeuvres complètes de Madame de Girardin (Tome III)